Les effets des barrages en question

Protection des crues en montagne : quels sont les effets des barrages ? Face au risque d’inondation par les crues des rivières et torrents, des milliers d’ouvrages de protection ont été construits en France dès le XIXe siècle.

Entretenir ces dispositifs et en construire de nouveaux nécessite de mieux comprendre leurs effets sur les processus de crues. Une thèse Irstea clarifie les dynamiques en jeu et dresse un panorama des critères de conception des barrages filtrants. Pour se prémunir des crues des torrents, faut-il entretenir les barrages à correction torrentielle ? Concevoir uniquement des plages de dépôt, ouvrages fermés par des barrages filtrants pour piéger les matériaux solides (sédiments, bois) en amont des villages ? Guillaume Piton a étudié l’effet des barrages sur la production et le transport des matériaux solides des torrents alpins, dans le cadre d’une thèse à Irstea. Il propose, à travers une analyse des archives techniques : un état de l’art des nombreux effets des barrages sur leur environnement, et une 1ère revue internationale des critères de conception des plages de dépôt.
Des analyses plus fines de l’influence des barrages à correction torrentielle sur le transport de sédiments, via un modèle physique, ont ensuite confirmé que l’ajout de barrage favorise un transport plus régulier des sédiments en de plus petits volumes, limitant ainsi les risques liés aux crues. « Les anciens ouvrages ont été conçus avec l’objectif de limiter au maximum les flux de sédiments transportés par les crues, pourtant essentiels à l’équilibre de notre écosystème. Réouvrir certains barrages et concevoir des ouvrages « sélectifs » pour libérer un flux de sédiments optimal face aux crues qui ne représentent pas un danger, tout en limitant les flux en cas de crues exceptionnelles, est aujourd’hui nécessaire », explique Guillaume Piton. Encore faut-il comprendre les mécanismes de dépôt des sédiments dans les ouvrages. Une technique innovante d’acquisition de données en milieu complexe a été développée pour identifier précisément ces dynamiques, à l’aide d’un modèle physique déterminé sur la base de 31 plages de dépôt alpines. Ces analyses, croisées avec les 1ères observations directes de crues par caméras, ont mis en évidence des mécanismes de rétro-contrôle, c’est-à-dire que l’écoulement influence le dépôt et vice-versa. Elles ont aussi abouti au développement d’une nouvelle méthode pour estimer le transport des sédiments dans les cours d’eau pavés. Enfin cette étude souligne l’influence de la morphologie de la plage de dépôt dans la gestion du piégeage sélectif des sédiments.
Ce travail sera récompensé par le Prix Jean Valembois 2017 décerné lors du colloque « Hydraulique des barrages » à Chambéry, les 29 et 30 novembre 2017.